Durant notre parenthèse dans la piraterie web, des articles ont été produits qui ont échappé à nombreux d’entre vous, même si certains de nos confères les ont repris sans nous citer. Celui-ci est l’un d’eux. Il vient d’être légèrement retouché, l’actualité ayant évolué depuis lors.
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En France des économistes sous tutelle de Matignon ont commis, en juin dernier, un rapport prônant la légalisation du cannabis, tandis qu’en Amérique du Nord de nombreux Etats ont franchi le pas depuis 5 ans et récupèrent des milliards de dollars dans une filière jusque-là abandonnée à la clandestinité. L’essentiel de l’expérience des autres pays… pour une légalisation de la consommation du chanvre indien au Gabon et un gain économique insoupçonné.
Au moment où Hervé Omva Ovono fait la promotion de l’Iboga dans l’optique de son exportation. Quelques mois après qu’il ait été question de gager les titres fonciers de l’État pour lever des fonds sur les places financières. Et au moment où l’État gabonais enchaîne les emprunts obligataires, une idée venue de l’Ouest lointain pourrait, appliquée au Gabon, faire gagner de l’argent au pays. Elle projetterait également le Gabon aux avant-postes de la modernité pour ce qui est des libertés individuelles, vu qu’elle porte sur la libéralisation de la consommation, détention et surtout vente du cannabis.
L’idée va hérisser les cheveux de nombreux Gabonais calfeutrés dans la bien-pensance réactionnaire. Ils ne savent cependant rien des déterminismes historiques de la prohibition du cannabis. De consommation millénaire, l’interdiction de cette substance n’est formellement intervenue pour la première fois qu’en 1916, en France et Grande-Bretagne. Le monde entier n’a fait que copier ces anciennes puissances coloniales. Qu’on l’appelle cannabis, marijuana, ganja, bang, yam, tabac-Congo ou chanvre indien, la prohibition de ce végétal était avant tout une décision politique. Les études commanditées alors, notamment par l’Angleterre, n’avaient jamais conclu à la dangerosité, plus que l’alcool, de la petite herbe sur la santé.
80 milliards de francs CFA en 6 mois et 18.000 emplois en 3 ans
Le phénomène de la libéralisation du cannabis part du Far West où l’État du Colorado encaissait, mi-2014, 135 millions de dollars (un peu plus de 80 milliards de francs CFA) en six mois. À l’issue d’un référendum populaire, cet État de l’ouest des États-Unis venait d’autoriser, la consommation, la détention et la vente du chanvre indien. En contrepartie de quoi, le Colorado taxe l’activité au prix fort : 15 % d’impôt indirect sur la consommation (droit d’accise) prélevé sur la quantité plutôt sur la valeur du produit et une très forte taxe sur les ventes. L’avenir fiscal de cet État de 5,6 millions d’habitants est devenu radieux, la légalisation de la marijuana y attirant par conséquent de nombreux touristes cannabiques venant y passer du bon temps mais aussi y délier les cordons de la bourse. Le marché du cannabis y a créé 18.000 emplois à temps plein en trois ans.
Emboitant le pas au Colorado, 29 États américains ont légalisé l’usage du cannabis. N’autorisant depuis 1996 que l’usage médical du cannabis, la Californie, État le plus peuplé de l’union américaine, en a légalisé l’usage récréatif le 1er janvier 2018. Il faut tout simplement avoir au moins 21 ans et présenter une carte d’identité ou un permis de conduire valide pour s’acheter jusqu’à 28 grammes, par personne, de l’herbe qui fait rire.
France : la ringardisation de 50 ans de politiques publiques sur le cannabis
Si en France, le débat sur la légalisation du chanvre indien a toujours été balayé d’un revers de la main par les acteurs de l’exécutif, le 20 juin dernier, le Conseil d’analyse économique, structure placée sous l’autorité du Premier ministre, a produit un rapport intitulé « Cannabis : comment reprendre le contrôle ? » Raillant 50 ans de politiques publiques en la matière, l’étude préconise, grosso modo, d’instaurer un monopole public de production et de distribution de cette drogue. Il entrevoit 2 milliards de recettes fiscales par an sur l’hypothèse d’un prix de vente du gramme d’herbe à 9 euros, TVA de 20 % et droit d’accise inclus.
Menée par des économistes – Emmanuelle Auriol, professeur à la très réputée École d’économie de Toulouse, et Pierre-Yves Geoffard, professeur à École d’économie de Paris -, le rapport de 12 pages explore des pistes très concrètes de mise en vente libre du cannabis. Notamment, la délivrance par l’Etat de licences à des « producteurs et distributeurs agréés », la vente dans des boutiques spécialisées, l’interdiction aux mineurs, le chapeautage du système par une autorité administrative indépendante. Celle-ci serait chargée de la régulation du marché et de la création des conditions pour assécher le marché noir grâce à une production suffisante, de bonne qualité et à un prix suffisamment bas.
Selon la note du Conseil d’analyse économique une «consommation modérée» de cannabis n’a « pas d’effets nocifs sérieux avérés » sur la santé des adultes. Elle augmente au contraire le risque de schizophrénie « des plus jeunes ». Ce qui amène à s’interroger sur la recrudescence de la violence ou de la criminalité qui pourrait découler de sa libéralisation. Dans le Colorado, ceux qui prédisaient une explosion de la violence ont été démentis. Sur les quatre premiers mois, le nombre des agressions avait baissé de 5,6 %. Les chiffres pour la suite n’ont pu être trouvés. Mais, la libéralisation soulagerait les prisons d’une catégorie de pensionnaires tout de même coûteux pour l’État.
Débat parlementaire chez les autres
Boris Vallaud, porte-parole des députés du Parti socialiste en France, a laissé entendre que le gouvernement français, qui a fermé la porte pour l’instant, devrait accepter un débat parlementaire sur le sujet pour que les uns et les autres puissent se faire une opinion définitive en faisant confiance aux experts. « Un certain nombre de ceux qui soutiennent cette initiative ne sont pas des gens irresponsables et donc je crois que c’est un débat qui mérite d’être engagé ». Et pourquoi pas au Gabon ? Jamais à l’initiative, toujours à la remorque ou au suivisme ?
Source : gabonreview.com