jeudi 27 juin 2019
Propos recueillis par A. F.
Jonathan Thivet 36 ans, régulateur au centre 15, victime de plusieurs cancers
«J’ai eu mon premier cancer à 20 ans, une tumeur rarissime. À l’époque, je fumais un peu de cannabis, comme beaucoup de jeunes. J’ai arrêté ensuite. Mais dix ans plus tard, j’ai fait une première récidive, et j’ai dû subir une grosse opération du dos. Entre la chimio et les douleurs liées à l’opération, je souffrais quasiment en permanence. J’ai repris le cannabis, qui m’a beaucoup aidé. J’ai pu voir la différence, avec ou sans. Ça m’a permis d’arrêter notamment les médicaments antinauséeux, mais aussi la morphine, que je prenais à haute dose. Or, j’étais ambulancier à l’époque et la morphine m’empêchait totalement de travailler. J’étais somnolent, je pouvais dormir jusqu’à quatre ou cinq heures par après-midi. Et j’étais complètement dépendant aussi. Ce qui n’a pas été le cas quand j’ai arrêté le cannabis. Aujourd’hui, je continue d’en prendre, car les douleurs sont toujours là. J’ai fait une deuxième rechute de mon cancer en 2018. Bien sûr, je fais attention à ne pas prendre de cannabis avant d’aller travailler ou de prendre le volant. Mais ça m’aide beaucoup : je dors mieux, j’ai de l’appétit, je peux bouger normalement. Pour en trouver, je vais dans les quartiers Nord de Marseille. Mais j’ai pu voir en voyageant combien c’était plus simple dans d’autres pays, à Barcelone par exemple, ou dans le Nevada, où même l’usage récréatif du cannabis est autorisé. Et je n’ai pas vu là-bas les dérives que peut causer la consommation d’alcool par exemple.
En France, même si la légalisation fait encore peur, je pense que les mentalités ont évolué et qu’une majorité de la population soutient l’idée du cannabis thérapeutique. Politiquement, c’est autre chose. À mon avis, l’État bougera quand il se rendra compte des bénéfices économiques et en termes d’emplois qu’il pourra en tirer. C’est l’argent, le nerf de la guerre, pas forcément la santé publique… Moi, je le fume, mais je sais que ce n’est pas la bonne façon de consommer le cannabis. Il existe beaucoup de dérivés, comme les huiles. Ce qui est sûr, c’est que sans, je serais totalement déprimé, incapable de travailler. Ma vie serait complètement différente, en beaucoup moins bien. »
Source : https://www.humanite.fr/sans-le-cannabis-je-serais-deprime-et-incapable-de-travailler-674141