Lieu = EHESS, Amphitéâtre F. Furet, 105 bd. Raspail, 75006 Paris
Horaires = 17h-20h / gratuit et sans inscription
Ben Morea, artiste : « LSD et production éditoriale dans le milieu de l’autonomie newyorkaise dans les années ‘60: Ben Morea, Black Mask and le group « Up Against the Wall, Motherfuckers! »
Jaïs Elalouf, artiste : « Psychédéliques et mouvements de contestations »
Kiki Picasso (alias Christian Chapiron), artiste : « Apologie du bad trip »
Captain Cavern, artiste : « Je pense donc je suis drogué »
Pierre-Antoine Pellerin, linguiste, MC Lyon III : « L’Ecriture en manque : addiction, sevrage et delirium tremens dans Big Sur (1962) de Jack Kerouac »
Du club des « haschischins » à William Burroughs et Jack Kerouac, en passant par les « poètes maudits », Henri Michaux et les amateurs de mescaline, des écrivains ont voulu expérimenter les effets des drogues sur leur écriture. A partir des années 1960, des rockeurs aux rappeurs, en passant par les musiciens de reggae et techno, consommation de drogues et musique ont marché de concert. De fait, depuis l’émergence de la beat génération, tous les arts en Occident ont été influencés par l’usage de psychotropes venus d’ailleurs. En particulier les arts dits psychédéliques, exprimés notamment dans la peinture, qui ont donné lieu à un véritable courant artistique. Un courant qui s’est inscrit et a participé au mouvement de contestation non seulement des arts conformistes mais de la société autoritaire et inégalitaire. Faut-il en conclure que les drogues sont propices à la création artistique, qu’elles peuvent apporter un plus au talent, qu’elles ont de l’influence sur les artistes qui s’en servent et, à travers eux, sur les gens qui les lisent, écoutent, regardent ?
Ben Morea est né en 1941. Il est devenu dépendant à l’héroïne quand il était jeune, pendant son adolescence. Sa carrière de peintre commence pendant un séjour dans l’hôpital d’une prison. Dans les années qui suivent, il chevauche la peinture et l’activisme sociale pour atteindre une nouvelle vie. Sa peinture à connu les teintées de la rébellion après avoir rencontré Dada et le Surréalisme ; aussi, il crée avec d’autres la revue « Black Mask ». Il a vite développé une forme de vie subversive ; il fonde aussi le groupe Up Against the Wall, Motherfuckers !, l’un des rares groupes « politiques » à s’approprier des nouvelles possibilités révolutionnaires mises à disposition après la découverte des substances psychédéliques. Après être entré dans la clandestinité et avoir fait face à une réalité changeante, il commence à chercher les moyens d’atteindre une perspective « totale », il est converti à une religion originaire des peuples indiens du Colorado, comprenant éléments psychotropes et animistes. La discussion sera centrée sur cette recherche, et sur la nécessaire escalade vers une nouvelle REALITE’ politique, culturelle et révolutionnaire.
Jaïs Elalouf : Psychédéliques et mouvements de contestations
Il sera exposé les contradictions entre les valeurs de la société de consommation des années 50 et les caractéristiques du LSD, avec la présentation de quelques protagonistes. Le programme de la CIA « MK-Ultra » vivement actif dès la fin des années 50 et ses fantaisies meurtrières. La contre culture des années 60 et quelques sujets de contastations à travers des exemples de mouvements comme les : Provo, Diggers, Mai 68 and les communautés. Un voyage graphique à travers des œuvres d’esthétique psychédélique inédites de la Collection Elalouf du Psychedelic Art Center.
Jaïs Elalouf a présenté 500 shows audiovisuels où il mixe art, son et images; étant à la fois producteur de musique, DJ, réalisateur de films et commissaire d’exposition. Il manage l’agence de promotion Ping Pong qui à représenté le label anglais Ninja Tune pendant 15 ans. Il crée des musiques et films engagés avec ses propres tournages et des samples d’images d’archives, entre douceur rétro et groove électronique. Il créée actuellement le premier Centre d’Art Psychédélique à partir de sa collection, l’une des plus grandes sur ce sujet.
Pierre-Antoine Pellerin : L’Ecriture en manque : addiction, sevrage et tempérance dans l’oeuvre de Jack Kerouac
Cette communication se propose de lire l’œuvre de Jack Kerouac (1922-1969) sous l’angle des rapports qu’entretiennent drogue, intensité et écriture dans le contexte de l’idéologie de l’endiguement (« containement »), du conservatisme politique des années Eisenhower et des discours de la « crise de la masculinité » dans l’après-guerre. Alors qu’on a souvent tendance à présenter l’auteur américain comme le fer de lance d’une recherche d’intensités propres à revitaliser une époque prise dans les rets du conformisme et du consumérisme, notamment par la consommation d’excitants (« uppers ») et de calmants (« downers »), il s’agit ici de montrer la centralité des notions de maîtrise de soi, de sevrage, de stase et de dépression dans son œuvre, comme l’illustre une lecture de romans comme The Dharma Bums (1957 ; 1958), Desolation Angels (1956 ; 1965) et Big Sur (1961 ; 1962) comme des récits appartenant au genre de la tempérance.
Pierre-Antoine Pellerin est maître de conférences en littérature américaine à l’université Jean Moulin – Lyon 3. Il travaille notamment sur l’expérience et la représentation de la masculinité dans la littérature et les arts à l’époque de l’après-guerre aux Etats-Unis et prépare actuellement une monographie consacrée à l’œuvre de Jack Kerouac.
Christian Chapiron, alias Kiki Picasso, est né en 1956 à Nice. En 1974, il fonde le groupe Bazooka Production avec Loulou Picasso, Olivia Clavel, Bernard Vidal et Lulu Larsen. Les membres de Bazooka pensent que les espaces d’expression alloués par les galeries et les institutions ne sont pas adaptés à leurs créations. Bazooka désire envahir les médias. L’invasion commence par les journaux de bandes dessinées, elle se poursuit dans la presse militante. Leurs dessins sur l’information déclenchent des polémiques. Les journalistes de Libération disent que « Bazooka fait du Picasso ». A la fin des années 70, « faire du Picasso » sous-entendait dans le langage commun « faire n’importe quoi ». Bazooka commencent à signer les images Picasso. Après la dissolution de Bazooka, Christian Chapiron s’oriente vers la vidéo et la peinture électronique. En 1995, il retourne vers la presse en prenant la direction artistique du magazine « Maintenant », le premier média français qui dénonce l’implication de la France dans le génocide rwandais. Vers l’an 2000 et après, Kiki écrit et illustre « Psychoactif, un livre hallucinant » sur l’usage récréatif du LSD, réalise le long-métrage « Traitement de substitution N°4 », construit des Chars de Carnaval pour les villes de Paris et de Bordeaux, la Gay pride, la Fête de la musique, la techno-parade… Ses films électrisent les dance floors, ses images décorent les salles de concert et le Cirque électrique.
Captain Cavern. Né en 1956, dessinateur, illustrateur et peintre, Captain Cavern est armé, non pas d’une massue comme le personnage du dessin animé éponyme d’Hanna & Barbera, mais de crayons, plumes et pinceaux pour nous transporter dans l’espace-temps multidimensionnel des galaxies virtuelles. Un univers enchanté, somnambule, qui défile en images pop, cubistes et psychédéliques. Ses premiers dessins sont apparus sur la scène graphique underground française au début des années 80, dans la lignée de Bazooka, Elles sont de sortie, Placid & Muzo… Il a collaboré à de nombreux graphzines et en a créé plusieurs (Vertèbres, Crimsex…). Il est aussi le fondateur et rédacteur en chef du journal Vertige, publié en kiosque. Et l’auteur de plusieurs BD : Le Gouffre de la piscine aux Requins Marteaux, Psychic Murder Show chez United Dead Artists. Captain Cavern commence vraiment à peindre en 1985, signant pour la première fois sous ce nom pour un affichage sauvage sur des panneaux publicitaires 4×3 organisé par les Frères Ripoulins autour de la place de l’Opéra. Dès lors, il ne cessera plus de peindre. Dessin, peinture… sont pour lui des moyens d’atteindre, à travers les faux-semblants de la perception, le merveilleux, le féerique, la magie.
Source : http://www.asud.org/2019/05/09/drogues-et-creativite/