Réponse du CIRC à une tribune prohibitionniste
Dans une récente tribune publiée dans le journal Ouest-France, un certain Jean-Pierre Pujol (de la bande à Costentin) s’alarme : « Légaliser le cannabis en France serait une erreur ». En s’appuyant sur des chiffres sortis de leur contexte, il agite une fois de plus les peurs bien connues des tenants de la prohibition. En tant que collectif militant depuis plus de 30 ans pour une réforme des politiques sur le cannabis, le CIRC tient à rétablir quelques vérités.
Une avalanche de chiffres sans contexte
L’auteur évoque une hausse des hospitalisations, des accidents de la route et des troubles psychiatriques au Canada ou aux États-Unis, comme si ces données suffisaient à disqualifier toute forme de légalisation. Ce qu’il ne dit pas, c’est que la visibilité accrue de ces phénomènes découle souvent d’un meilleur accès aux soins, d’une plus grande transparence et d’un recul de la stigmatisation. La légalisation n’a pas supprimé les risques — elle a permis de mieux les connaître et les accompagner.
Et faut-il rappeler que ces risques existent déjà sous un régime prohibitionniste qui ne protège personne ? Ni les jeunes, qui consomment massivement en France, ni les usagers adultes, régulièrement criminalisés, ni les riverains des quartiers populaires pris en étau entre précarité et économie souterraine.
La consommation n’explose pas partout, et surtout pas chez les jeunes
L’argument selon lequel la légalisation ferait exploser la consommation est infondé. De nombreuses études montrent que dans les pays ou États ayant légalisé, la consommation chez les jeunes ne connaît pas d’augmentation significative, et tend même à diminuer lorsqu’une politique d’information honnête est mise en place. Quant à l’évolution globale du nombre d’usagers, elle doit être comprise dans un contexte de déculpabilisation et de sécurisation de l’usage — ce qui est précisément l’un des objectifs de la légalisation.
Le marché parallèle ne disparaît pas en un jour — mais il recule
Dire que la légalisation n’a pas supprimé le marché parallèle est une évidence… qui n’a rien de surprenant. Il est absurde de prétendre qu’un système vieux d’un siècle peut être démantelé en quelques années. Mais partout où l’autoproduction est permise, où les Cannabis Social Clubs sont tolérés, où les prix sont accessibles, le marché illégal recule fortement.
En France, l’interdit ne fait que nourrir un marché clandestin opaque, sans aucune garantie sanitaire, où tout se vend sans distinction, sans contrôle, sans information et souvent aux mineurs. Le seul outil pour sortir de cette impasse, c’est la fin de la prohibition.
Stop à la mystification autour du THC
L’auteur évoque une soi-disant dérive des taux de THC dans les pays ayant légalisé. Cet argument, souvent repris, repose sur une confusion volontairement entretenue. Le problème n’est pas le « taux de THC », mais le manque d’information globale sur les cannabinoïdes présents dans un produit : THC, CBD, CBG, THCV… La légalisation permet justement d’étiqueter, d’analyser, de comprendre, de doser selon les besoins et les profils. Aujourd’hui, l’usager ne sait rien de ce qu’il consomme.
La prohibition condamne à l’opacité. La légalisation ouvre la voie à la transparence.
La vraie incohérence : continuer à interdire
Le plus paradoxal dans cette tribune, c’est de vouloir faire de la prévention en maintenant l’interdit. Comment parler honnêtement d’un produit qu’on diabolise, qu’on ne connaît pas, qu’on refuse de regarder en face ? Comment accompagner les usagers en les menaçant de prison ? Comment protéger les jeunes en les laissant seuls face à des circuits clandestins ?
Le CIRC défend un modèle fondé sur l’autoproduction, la création de Cannabis Social Clubs, la possibilité d’acheter du cannabis dans des lieux encadrés, non commerciaux, avec de l’information, de la réduction des risques et du lien social. Ce modèle existe déjà ailleurs. Il est temps de cesser de le caricaturer.
Conclusion
La prohibition n’a jamais protégé personne. Elle criminalise, stigmatise, invisibilise, pousse les usages vers les extrêmes, et empêche tout dialogue sincère. Ce n’est pas « malgré » la prohibition que les choses vont mal : c’est à cause d’elle. Il est temps de le dire clairement.
Le cannabis n’est pas une drogue anodine — mais c’est une plante que des millions de personnes consomment, pour mille raisons. Plutôt que les punir, écoutons-les. Plutôt que les mépriser, respectons-les. Plutôt que les infantiliser, faisons-leur confiance.
Le vrai courage politique, en 2025, ce n’est pas de répéter les dogmes d’hier. C’est de reconnaître, enfin, que la prohibition est une impasse. Et que la liberté, la santé publique et la justice exigent un changement.
Collectif d’Information et de Recherche Cannabique (CIRC)
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