La profession déplore la répression qui frappe indistinctement les consommateurs de CBD et les fumeurs de cannabis classique. Un commerçant de Vendôme milite pour l’instauration d’une marge de tolérance.
C’est un article paru dans la NR le 10 novembre dernier qui a poussé Antonin Blaise, gérant de la Galerie du chanvre, à Vendôme, à réagir. Il était question d’un automobiliste condamné pour usage de stupéfiants au volant. L’homme avait consommé du CBD, un produit légal, mais qui, lorsqu’il est fumé, rend positif le test de dépistage plusieurs heures après la consommation. La législation autorise en effet la présence maximale de 0,3 % de THC, le principe actif du cannabis, dans les fleurs de chanvre.
« Comme vous le relatez dans l’article, c’est la molécule THC qui ne doit pas être détectée lors des contrôles salivaires, urinaires ou sanguins chez les conducteurs, sous peine de poursuites, explique le commerçant vendômois. Or il existe des produits au CBD absolument exempts de THC, donc sans risques pour le permis de conduire. Par exemple dans notre gamme, on y trouve des gélules et pastilles apaisant stress et angoisses, souvent achetées par des commerciaux habitués aux trajets automobiles, et le gel arnica CBD plébiscité par les personnes âgées pour apaiser leurs douleurs quotidiennes. »
Le souci c’est qu’en juin dernier, la Cour de cassation a rendu une décision qui inquiète à la fois les consommateurs et les vendeurs de CBD. La plus haute juridiction stipule en effet que l’infraction est constituée s’il est établi que le prévenu a conduit un véhicule après avoir fait usage d’une substance classée comme stupéfiant (THC), peu important la dose absorbée.
« Voilà trois ans que le CBD est légal en France », rappelle le gérant de la Galerie du chanvre qui est également élu au conseil d’administration de l’Union des professionnels du CBD (UPCBD). Ce syndicat milite pour une réglementation du secteur car les filous qui revendent des produits de mauvaise qualité voire frelatés ne manquent pas, en particulier sur Internet. Antonin Blaise est très attentif à la provenance des articles qu’il propose. Il informe ses clients pour leur éviter de prendre des risques, que ce soit avec leur permis de conduire, les professions réglementées devant se plier à des dépistages aléatoires (militaires, conducteurs de trains, bus, tram) et les sportifs de haut niveau étant soumis à des tests antidopage recherchant le THC.
Mais la décision de la Cour de cassation jette le trouble dans le secteur, un an après la levée de l’interdiction de vente des fleurs de CBD. « Des personnes consommant du CBD autrement qu’en le fumant pourraient prendre peur et cesser de consommer des produits absolument sans risques sur leur santé et leur permis de conduire. Les personnes âgées sont particulièrement sensibles aux risques encourus pour leur permis de conduire et ce sont elles les principales consommatrices de ces produits sans aucun risque pour le permis. Cela représente environ 30 % de notre clientèle », indique Antonin Blaise.
« Il ne peut pas y avoir de confusion ! »
Les professionnels du secteur déplorent l’amalgame entretenu par les pouvoirs publics entre consommateurs de CBD et fumeurs de cannabis classique. « Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, n’a pas commandé de tests adaptés permettant de différencier une consommation de CBD, parfaitement légale et sans aucun risque pour la conduite, d’une consommation de cannabis classique. »
Antonin Blaise juge ce positionnement injuste alors qu’il existe des tests permettant de distinguer les deux types de consommation grâce « à une marge de tolérance de THC dans le corps, à laquelle la molécule n’altère pas les capacités des conducteurs, pour que les consommateurs de CBD ne soient pas inquiétés ». D’après ses calculs, un fumeur de CBD aurait 66 fois moins de THC dans le corps qu’un consommateur de cannabis classique. « Il ne peut pas y avoir de confusion ! » insiste le commerçant.