Paris, le mardi 12 septembre 2023 – Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a annoncé plusieurs mesures pour renforcer la lutte contre le trafic de drogue, alors que la journée d’hier a été marquée par un drame terrible à Marseille : une jeune femme a été mortellement blessée par des tirs de kalachnikov, alors qu’elle était chez elle et que faisait rage une rixe armée liée aux stupéfiants.
« Nous menons une guerre » contre le trafic de drogue, a affirmé le ministre de l’Intérieur dans une longue interview donnée au Parisien le 8 septembre dernier, qualifiant cette lutte contre les réseaux informels de véritable « bataille de Stalingrad ». Gérald Darmanin est notamment revenu sur la légalisation du cannabis et sa volonté de monter une nouvelle unité d’intervention.
Pas de légalisation du cannabis en vue
Ainsi, le ministre s’est de nouveau déclaré totalement opposé à la dépénalisation ou à la légalisation du cannabis. « J’y suis très opposé. Pas par idéologie, mais par sens pratique, car ça ne marche pas », a-t-il indiqué à nos confrères du Parisien. « Le marché légal ne remplace jamais le marché illégal, il le complète. […] Par ailleurs, aujourd’hui, les points de deal sont multiproduits, avec du cannabis, mais aussi d’autres drogues, comme la cocaïne. Si vous légalisez le cannabis, vous ne supprimez pas les points de deal ».
Il pense d’ailleurs que la légalisation n’aurait aucun impact sur les organisations criminelles, au contraire : « partout dans les pays où le cannabis a été légalisé, les organisations criminelles demeurent, et souvent deviennent plus puissantes ». Le ministre de l’Intérieur pense donc qu’il faut renforcer les moyens de l’État et la lutte contre les réseaux, d’où la création d’une nouvelle unité dédiée.
Une nouvelle unité d’intervention nationale
Elle sera bâtie « sur le modèle de la CRS 8 », une unité d’une centaine d’hommes spécialisée dans les violences urbaines et le trafic de drogue. Cette dernière a d’ailleurs été déployée hier à Nice, après la fusillade aux Moulins.
La nouvelle unité annoncée par Gérald Darmanin sera dotée « d’une centaine d’effectifs mêlant policiers et gendarmes », avec « des chiens, des enquêteurs spécialisés dans le blanchiment, des moyens technologiques ». Leur rôle sera d’appuyer les services locaux pour mener des opérations d’envergure, en réaction ou en prévention. « C’est aller au-delà du nettoyage d’un point de deal, car il s’agit là de démanteler des réseaux et de définir des cibles. Notre enjeu, c’est de mettre ces criminels hors d’état de nuire durablement », a déclaré le ministre.
Le ministre de l’Intérieur considère d’ailleurs que les « écoutes téléphoniques à l’ancienne » sont de moins en moins efficaces, face à la recrudescence des messageries cryptées notamment (Telegram, Signal…). Il estime donc que les méthodes utilisées dans la lutte contre le terrorisme pourraient être étendues au trafic de drogue. « Si nous considérons tous que la drogue est un combat majeur, alors il faut des outils adaptés », explique-t-il.
Ces annonces interviennent dans un contexte tendu, avec une recrudescence des règlements de comptes violents, notamment à Marseille et à Nice. L’Agence France-Presse a d’ailleurs calculé qu’une « quarantaine » de personnes sont décédées cette année sur la seule ville de Marseille sur fond de guerre de territoire et de trafic de drogue, et les victimes dites « collatérales » se multiplient. Des chiffres bien plus élevés qu’en 2022, année pendant laquelle 31 morts avaient été à déplorer.
Raphaël Lichten
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