La question se pose alors que deux économistes proches du Premier ministre se prononcent en faveur d’une telle mesure.
Faut-il ou non légaliser le cannabis en France ? Pour les deux économistes Emmanuelle Auriol et Pierre-Yves Geoffard, membres du Conseil d’analyse économique (CAE) placés auprès du Premier ministre, la réponse est oui.
Dans une note officielle, ces spécialistes se montrent favorables à une légalisation du cannabis – thérapeutique comme récréatif – principalement pour des raisons économiques. Selon eux, le système actuel « pèse lourdement sur les dépenses publiques » et « profite aux organisations criminelles » alors qu’une légalisation encadrée aurait une incidence positive sur les finances publiques.
Légalisation et économie
Plus précisément, la légalisation permettrait d’ »agir sur les prix et les taxes » et de « constituer un apport dans les finances publiques tout en créant des emplois » remarque de son côté le docteur Bernard Basset, vice-président de l’Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie (ANPAA).
De même, dans un communiqué publié le 20 juin en réponse à la note des économistes du CAE, l’ANPAA indiquait : « Nous savons déjà que la prohibition ne profite pas à la santé, nous savons désormais qu’elle nuit à l’économie. » Et, selon cette association, « la légalisation permettrait non seulement de mettre en place une réelle politique de prévention des risques, mais aussi d’améliorer la sécurité publique en asséchant les ressources des réseaux criminels. »
Contrôler les produits et les teneurs
Mais quelles conséquences sanitaires une telle mesure pourrait impliquer ? « Notre avis est que la légalisation entraînerait un risque moindre que la situation actuelle » avance le docteur Bernard Basset. « Car actuellement, les produits qui circulent ne sont pas contrôlés et sont de plus en plus dosés en principe actif, le THC, ce qui accroît le risque psychiatrique« , poursuit-il.
Un des principaux avantages d’une légalisation serait donc de « reprendre le marché aux dealers et aux réseaux criminels, tout en contrôlant et en standardisant les teneurs en THC » appuie le docteur Basset. Si le marché était légal, il serait également plus facile de décourager la consommation de cannabis car en France, « personne ne veut l’encourager » rappelle le vice-président de l’ANPAA.
Et qui dit consommation de cannabis ne dit pas forcément addiction : « l’addiction au cannabis est très faible, contrairement aux produits légaux que sont le tabac ou l’alcool » observe le docteur Basset. De plus, « à l’inverse de l’héroïne, de la cocaïne ou même de l’alcool, il est presque impossible de faire une overdose » avec du cannabis, appuient les deux économistes du CAE.
Pas de tourisme cannabique en France
En matière de légalisation, d’autres pays ont déjà sauté le pas : le Canada, depuis octobre 2018, mais aussi l’Uruguay depuis 2013 et dans huit états des États-Unis (Alaska, Arizona, Californie, Colorado, Massachussetts, Nevada, Oregon et l’état de Washington). Pour le moment, « la comparaison reste difficile car la manière dont le cannabis est légalisé varie beaucoup entre ces pays » constate le docteur Basset.
« Mais au Colorado, l’état qui a la plus longue expérience de légalisation du cannabis, cette mesure aurait réduit la consommation d’alcool, y compris chez les jeunes » observe le spécialiste. Deux points sont à déplorer : « le tourisme cannabique qu’a développé le Colorado, ce qu’on ne souhaite absolument pas faire en France, et une recrudescence des accidents de la route en particulier due au cannabis ingéré dans des gâteaux dont l’effet est retardé par rapport au cannabis fumé » souligne Bernard Basset.
Un signe d’alerte qui doit être pris en compte dans l’encadrement nécessaire en cas de légalisation. L’ANPAA avait en ce sens déjà émis plusieurs propositions en 2016 pour encadrer la légalisation du cannabis : la mise en place d’une légalisation réglementée et contrôlée, l’interdiction de vente de cannabis aux mineurs, la responsabilisation de personnes exerçant des activités à risque ou encore l’interdiction de la publicité pour le cannabis.
Mais si près d’un Français sur deux se dit favorable à une légalisation du cannabis selon une étude publiée mi-avril par l’Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT), la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye a rappelé qu’une telle mesure n’était pas à l’ordre du jour.
Source : https://www.francetvinfo.fr/sante/drogue-addictions/cannabis/cannabis-quelles-consequences-d-une-possible-legalisation-sur-la-sante-des-francais_3505221.html