Le point de vente ouvrira ses portes à Vernier, dans le quartier de Châtelaine. Les consommateurs pourront s’inscrire en ligne dès le 1er octobre.
Il sera bientôt possible pour quelques centaines de Genevois de fumer du cannabis en toute légalité. Ce jeudi, les autorités ont présenté les modalités de leur projet de vente contrôlée de marijuana. La boutique ouvrira courant décembre, dans le quartier de Châtelaine à Vernier. L’essai durera trois ans. Les consommateurs souhaitant participer à l’expérience pourront s’inscrire en ligne sur le site de l’association Change dès le 1er octobre.
La «Cannabinothèque» aura pour but de mieux étudier les effets d’une vente encadrée sur les usagers de cette substance. «Face à l’échec de la politique de répression envers les consommateurs de cannabis, la Confédération a autorisé plusieurs projets pilotes, dont celui à Genève», explique Ruth Dreifuss, ancienne conseillère fédérale et présidente de l’association ChanGE qui porte le projet.
Cette structure aura la charge de gérer le point de vente à Vernier. Avant l’ouverture, des entretiens seront menés avec les personnes s’étant portées candidates. Les participants sélectionnés devront régulièrement remplir des questionnaires évaluant leur manière de consommer et l’évolution de leur comportement. Un millier de personnes au plus pourra bénéficier de ce cannabis légal.
Cannabis local
La consommation sur place et dans l’espace public sera interdite. Chaque client pourra acheter au maximum 10 grammes de THC (ndlr: la molécule psychoactive du cannabis) par mois. Les produits fournis ne pourront pas dépasser une concentration de 20% en THC. Leur prix s’alignera sur celui du marché noir, pour ne pas inciter à la consommation.
D’autres expériences similaires sont ou seront lancées à travers la Suisse. Mais le projet genevois se démarque par sa gestion associative et sans but lucratif. Un consommateur choisi par ses pairs siégera au sein du comité de pilotage. Les produits seront fournis par une PME genevoise, qui se procure les plants de cannabis chez des paysans romands. Les vendeurs de la Cannabinothèque seront formés à la prévention et la réduction des risques.
«Nous chercherons à savoir si l’achat de cannabis en toute légalité améliore le bien-être des consommateurs»
L’Université de Genève (UNIGE) mènera une étude sur le comportement des consommateurs. «Nous chercherons à savoir si l’achat de cannabis en toute légalité améliore le bien-être des consommateurs, expose Sandro Cattacin, sociologue à l’UNIGE. Nous analyserons aussi les effets du lieu sur le voisinage. Comment les riverains accueilleront-ils ce projet? Quel effet aura le point de vente sur la microcriminalité?»
L’emplacement de la Cannabinothèque n’a pas été choisi au hasard. «Nous avons une approche pragmatique, résume Martin Staub, conseiller administratif de la Ville de Vernier. Notre commune connaît une problématique de deal qui gêne la population. La régulation du cannabis peut être une solution.» De plus, le quartier de Châtelaine est bien connecté à la ville de Genève et le reste du canton. Le magistrat assure que le lieu de vente ne sera pas «fermé ou lugubre» mais ouvert sur le quartier.
Acquérir plus de connaissances
Pour garantir que l’expérience se déroule sans problème, la police cantonale sera mobilisée. «Le rôle des agents consistera à accompagner ce projet, afin que des comportements illégaux ne se greffent pas sur cette bulle de légalité, souligne Carole-Anne Kast, conseillère d’État en charge de la police. Nous bénéficierons aussi de l’expérience acquise par les policiers au contact des consommateurs.»
«La Suisse a déjà fait évoluer sa législation. Mais le pas qui reste à faire est celui de la réglementation légale. C’est le plus difficile.»
Pierre Maudet, conseiller d’État responsable de la Santé, salue un projet «pionnier» pour le bout du lac. «Genève est un canton souvent pilote en matière de santé, relève-t-il. La Cannabinothèque sera très utile pour notre travail de prévention, car nous pourrons ainsi accéder aux consommateurs de cannabis de très près. Cela nous permettra d’acquérir plus de connaissances sur leurs pratiques et leurs besoins.»
À terme, la Confédération procédera à une évaluation des divers projets de vente contrôlée, pour déterminer l’approche la plus adéquate. Une loi de régularisation est aussi en cours de rédaction sous la Coupole. «La Suisse a déjà fait évoluer sa législation. Mais le pas qui reste à faire est celui de la réglementation légale. C’est le plus difficile», conclut Ruth Dreifuss.
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